Les Fous de toc se lâchent…Hubert Fontana
Hubert Fontana
Une matinée de pêche avec un invité surprise (Fermeture septembre 2008)
Pour cette fermeture, Gilles, Bernard et moi-même décidons d’aller dans la vallée de la Neste au dessus de Sarrancolin, au petit village d’Hilhet. Notre conviction était plus portée par la promesse d’une belle journée en plein air et d’un pique nique champêtre que par un beau tableau de pêche. A cet endroit, la Neste était bordée rive droite par une jolie plage de galets qui descendait d’un ilot d’habitations. Beau temps (à l’heure ou nous arrivions, le soleil était déjà bien haut), rivière limpide, niveau des eaux plutôt bas.
A peine à pied d’œuvre, Gilles et Bernard avaient déjà effectué quelques coulées que je n’avais toujours pas monté mon bas de ligne (et ça n’a pas changé avec le temps !). Rien d’étonnant à cela, il faut savoir prendre un peu de recul pour analyser la situation…Mais un certain quadrupède l’avait bien analysé depuis son jardin … Et c’est alors qu’un jeune chien joueur qui ne savait que faire de sa matinée est venu à ma rencontre, tout frétillant. J’étais loin de penser à ce moment là qu’il s’incrusterait dans mon action de pêche. Arrivé prêt de moi, il commence à quémander des caresses et à s’approprier les quelques mètres de rivière en face de moi en pataugeant à grand trop. C’est clair, il a marqué son territoire. Il est à noter que je n’avais toujours pas pêché et que mes deux amis avaient déjà changé deux ou trois fois leurs appâts. Je me décale pour mettre un peu de distance entre ce chien et moi, mais il me suit comme son maitre ! Après maintes remontrances et injonctions envers le chien, dont les oreilles restent sourdes, j’abdique et décide enfin de commencer à pêcher, avec mon ange gardien à mes cotés. A chaque lancé, il marque l’arrêt de sa patte repliée.
Première touche dans le courant, je travaille un peu le poisson pour le fatiguer, et le ramène dans peu d’eau. C’est un saumon de fontaine d’une trentaine de centimètres, honorable dans sa livrée tachetée. Mon copain à la truffe noire, intrigué par cette affaire, commence à le chasser de ses pattes avant. Le poisson, affolé, opère quelques manœuvres de diversion en zig zag. C’est alors que le fil se prend dans les pattes du chien : frétillement, aboiement, éclaboussure … Il finit par casser et le poisson retrouve son habitacle.
Je peste contre ce maudit animal de compagnie, tout en reconnaissant qu’il a aussi droit à quelques amusements. Je reprends un peu de sérieux et m’applique dans un lancé « trois quarts amont » comme dit Gilles.
Deuxième touche, je bataille pour ramener ma prise tout en essayant d’éloigner le chien qui n’attend qu’une chose : que le poisson se rapproche pour bondir dessus. J’arrive à protéger le saumon de fontaine des élans rageurs du chien et le saisi. Je l’inspecte et m’aperçoit que sa caudale est rognée. Déception, j’en déduis que c’est un poisson de bassin cimenté. Je lui rends la liberté.
Le doute me gagne, et si j’étais tombé sur un lâcher de fermeture ? L’intuition sera confirmée par les nombreuses touches renouvelées sur ce petit parcourt de quelques dizaines de mètres. Un banc de saumons de fontaine, calibrés à la même taille, se partageait le courant en face de moi. Nous apprendrons par la suite qu’il avait été déversé le matin même à l’aube. La surprise et l’émotion font place peu à peu à un jeu répétitif et insipide.
Je décide alors de rejoindre mes amis postés plus en amont et dont le regard rieur m’indique qu’ils ont tout suivi mes péripéties avec cet animal de compagnie.
Cette matinée reste bien vive dans ma mémoire, plus par le jeu de cet invité surprise, que par les nombreuse prises que j’ai relâchées.
Nous avons poursuivi nos actions de pêche plus en amont dans la vallée, et sur le chemin du retour, faisons un dernier arrêt à Ilhet. Les saumons n’avaient pas bougé, mais le chien était absent.
Peut-être s’était-il trouvé un autre copain pêcheur sur une autre berge ?