Changement climatique : quel devenir pour les milieux aquatiques ?
Dans le dernier numéro de La Pêche et les Poissons (mars 2017, n°862), un article intitulé : « Pêche et dérèglement climatique. Ce qui nous attend… » met en lumière les changements à venir concernant les milieux aquatiques et par voie de conséquence la pêche.
Cet article est notamment basé sur une étude de l’Onema publiée en octobre 2014 et intitulée « Les poissons d’eau douce à l’heure du changement climatique : état des lieux et pistes pour l’adaptation « . L’étude proposée, coordonnée par Florence Baptist (BIOTOPE), Nicolas Poulet (AFB) et Nirmala Séon-Massin (ONCFS), comprend quatre chapitres abondamment illustrés.
Le premier chapitre « Comprendre l’impact du changement climatique sur la ressource en eau » pose les bases en nous donnant une définition du climat et du dérèglement climatique. L’activité anthropique (gaz à effet de serre), source de modifications climatiques incontestables, au cours du XXème siècle une augmentation moyenne de la température de l’air de 1°C et de l’eau de 1,6°C en France métropolitaine. Partant de ce constat, des modèles de projections climatiques sont proposés et font état d’une élévation moyenne de la température dans les prochaines décennies de 1,5°C à 3°C, pouvant aller à un réchauffement climatique de 2° à plus de 4,5° à l’horizon 2100. Les impacts sur la ressource en eau et bien entendu les milieux aquatiques et la faune piscicole devraient donc inévitablement être importants.
Le second chapitre « Décrire l’évolution des peuplements de poissons à l’heure du changement climatique » présente les tendances générales que l’on peut d’ores et déjà observer avec comme cas d’étude trois zones géographique : le bassin du Rhône, le bassin de la Seine et le lac Léman. Les poissons étant des animaux à sang froid, l’effet d’une augmentation de la température sur les populations piscicoles est palpable avec des modifications significatives sur la reproduction, la croissance, etc. Les pressions anthropiques (barrages, retenues, artificialisation des berges…), dont la part reste difficile à quantifier, accentuent bien évidemment ces modifications écologiques en constituant un frein à l’adaptation des espèces à l’évolution du climat.
Le troisième chapitre « Anticiper l’impact du changement climatique sur les peuplements de poissons » propose des projections sur la distribution des espèces dans le futur à partir de modèles de distribution encore en cours de développement. En dépit d’un certain nombre d’incertitudes, le cas de la truite montrerait un net recul vers les zones amont, dans « des zones refuges » en altitude. Cette espèce d’eau froide (4°C à 19°C) serait donc la plus touchée par le changement climatique. Elle est considérée comme très vulnérable et particulièrement sensible malgré sa bonne capacité de colonisation.
Le dernier chapitre « Agir pour réduire la vulnérabilité des peuplements de poissons » est tout un programme. Il traite en effet des actions possibles pour réduire l’impact du changement climatique en confortant celles déjà entreprises pour la restauration et la préservation du bon fonctionnement des milieux aquatiques. En ce sens le rétablissement de la continuité écologique (effacement, arasement des obstacles,…) trouve pleinement sa justification non seulement pour l’heure actuelle mais aussi et surtout pour les années à venir.
En 2009, une étude menée par Laëtitia Buisson (UMR Ecolab, Univ. Paul Sabatier, Toulouse) dans le cadre de sa thèse, intitulée « Poissons des rivières françaises et changement climatique : impacts sur la distinction des espèces et incertitude des projections » avait déjà dressé un bilan à partir des données fournies par l’Office National de l’Eau et des Milieux Aquatiques en utilisant une approche de modélisation basée sur les niches écologiques des espèces tout en prenant en compte la variabilité entre les impacts projetés.
Cet étude avait notamment montré que si la majorité des espèces de poisson pourrait être affectée par les futures modifications climatiques, seules quelques espèces d’eau froide, comme la truite et le chabot, pourraient restreindre leur distribution aux parties les plus en amont des réseaux hydrographiques. Inversement, les espèces plus tolérantes en terme de températures pourraient étendre leur répartition.