« Ma plus belle truite » : Toqueur31
Un dernier récit pour clore cette série. Bonne ouverture à toutes et à tous.
56 cm de pure beauté
La matinée n’avait pas été très fructueuse malgré des conditions plutôt favorables pour cette journée de la mi-août : de rares touches timorées, du bout des lèvres, à peine perceptibles et difficiles à concrétiser…Ces dames dédaignaient nos appâts à l’exception d’une AEC flamboyante de 38 cm, probablement une rescapée de l’ouverture !
Seul l’ami Piscare tirera son épingle du jeu avec deux belles farios de 32 et 38 cm. Comment, on ne le saura jamais car rien n’est plus improbable que Sa pêche, souvent dénuée de toute logique et d’une technicité qui lui est propre. Peu importe le flacon pour Piscare, pourvu qu’il ait l’ivresse !
Mais le meilleur à venir était pour l’après-midi. Le temps tournait à l’orage et les nuages recouvraient peu à peu les rayons du soleil. Le secteur était nouveau pour nous. Large de 40 à 50 m en moyenne, la rivière présentait des successions de belles plages, de râpes et de rapides plus ou moins profonds. L’eau était mâchées par alternance et transportait pas mal de renoncules libérées en amont par les lâchers incessants d’une fichue microcentrale .
Le ver s’imposait dans ces conditions, j’en eschais donc un d’environ 3 à 4 cm sur un hameçon à tige longue n°12 monté sur un bas de ligne en fluorocarbonne de 12/100ème … je n’avais rien de plus « gros » sous la main. Pour la plombée, trois plombs de 6 et un de 8 suffisaient largement vu le débit et la profondeur du secteur.
Je commençais par prospecter une plage dont les ondulations trahissaient la présence d’un lit parsemé de galets de bonnes tailles. Premier passage sous la canne et première piquée, une petite fario de 25 cm. Ça s’annonçait plutôt bien ! Je m’apprêtais à faire un deuxième passage quand le niveau se mis brusquement à monter, pas de beaucoup mais suffisamment pour modifier la puissance du courant et la turbidité de l’eau. Rien de méchant toutefois, si ce n’est ces paquets d’herbiers qui arrivaient en masse.
Je relance exactement à la même distance et en fin de dérive c’est l’arrêt. Je ferre plutôt mollement dans un premier temps croyant à une accroche mais instantanément je m’aperçois qu’il n’en est rien. Un second ferrage plus ferme quasi immédiat et c’est le départ. Mon fidèle Ritma 71 se met à crépiter et laisse partir d’un seul trait une quarantaine de mètres de fil en direction de la rive opposée. C’est sûr, c’est du sérieux ! Je garde ma ligne tendu mais sans excès en laissant s’exprimer ma prise. Je suis assez confiant, pas d’obstacle majeur en aval ou en amont, ma seule crainte étant d’éviter les passages de renoncules.
Un peu, beaucoup à vrai dire, surexcité, j’appelle mes deux compères qui étaient partis plus en aval. M’entendant vociférer comme un damné, ils accourent au plus vite. Piscare, équipé d’une caméra, filme la scène qui durera au final presque une vingtaine de minutes. Mon poisson toujours à bonne distance décide alors se caler. J’attends bien 5 mn mais rien ne bouge. J’entends alors les premiers commentaires de mes acolytes, qui ne sont pas à « piquer des vers » : « C’est de l’herbe qui apprend à nager ! » « T’as accroché une pierre », « C’est un barbeau ! »… Bref, tout y passe ou presque.
Je tends ma ligne pour récupérer un peu de fil et nouveau démarrage, cette fois en remontant le courant. Trop lourd, trop gros, je ne peux lutter et me contente de le suivre.
Après avoir longé la berge sur une quarantaine de mètres avec plusieurs allers retours amont/aval, les prémices d’une première fatigue se font sentir. J’arrive enfin à reprendre du fil et à ramener peu à peu mon adversaire vers moi. J’y suis presque et je peux enfin entrevoir la bête : c’est bien une truite et une belle !
Premier essai de mise à sec et échec cuisant, la belle repart aussitôt vers la berge opposée, fait une embardée et descend vers l’aval. Je la suis et parcours une bonne cinquantaine de mètres. Je la retrouve enfin en bordure d’une râpe dans à peine 0,50 m d’eau, je la voie mais elle aussi ! Je me positionne derrière elle et prépare mon épuisette. Elle s’y engouffre à reculons, cette fois-ci je la tiens, du moins je le croyais car au moment de sortir l’épuisette de l’eau, elle virevolte d’un coup sec et replonge. Je hurle de rage mais rien n’est perdu : elle est bien accrochée !
Boostée par son évasion, elle tente à nouveau de remonter le courant mais je vois bien qu’elle n’en peut plus : la partie est bientôt terminée pour elle. La troisième tentative sera en effet la bonne et je laisserais enfin s’exprimer ma joie…
Elle est magnifique, tout simplement magnifique avec une robe cuivrée de toute beauté. Certainement un des plus beaux poissons qu’il m’a été permis de prendre…
Toqueur 31